domingo, 23 de mayo de 2021

Par monts et par Valls

 




Entretien avec Manuel Valls avant son retour en France.


Ici en V.O.  dans le quotidien El Mundo.


Ci-dessous, une traduction express:


Conversation avec Manuel Valls sur sa venue, son retour et sur un certain Giró

Par Arcadi Espada.


Manuel Valls vient de publier Pas une goutte de sang français (Grasset), le carnet du retour au pays. Le titre est tiré d'une phrase de Romain Gary : "Je n'ai pas une goutte de sang français mais la France coule dans mes veines".

-Ce livre magnifique, qui pourrait difficilement être écrit par un homme politique espagnol, a la particularité d'être publié par un conseiller municipal de Barcelone.

-Oui...

-Vous offrez vos services à la France dans le livre. Est-ce compatible ?

-Non. Le livre est le résultat d'une réflexion de trois ans qui ont changé ma vie personnelle et politique. Maintenant, je sais que je suis éminemment français : dans mes valeurs, dans ma façon de penser et dans ma façon de faire de la politique. Mon temps en tant que conseiller municipal à Barcelone est révolu. Je vais bientôt rendre ma démission publique.

-Je pense que c'était une erreur de ne pas partir après l'élection d'Ada Colau comme maire de Barcelone. Vous seriez parti en beauté.

-Ma femme le pense aussi. On ne peut pas réussir à tous les coups.

-Pourquoi êtes-vous vraiment venu ?

-Pour fuir la France. Avec l'effondrement du parti socialiste, c'est toute ma vie politique qui coule. Quarante ans. Je me séparais également d'avec ma femme de l'époque. Pour les vestiges du socialisme, je devenais un traître, car j'ai voté pour Macron. Et beaucoup d'amis de Macron me méprisaient. Et je me sentais la cible de l'antisémitisme et de l'islamisme radical : Edwy Plenel [président de Mediapart] m'accusait de faire la guerre aux musulmans. J'ai réussi à conserver mon siège de député, mais après une campagne qui m'a laissé épuisé et blessé. Et soudain, j'ai commencé à ressentir des inputs espagnols.

-Quel est le premier input ?

-On commencait à m'appeler pour que je donne mon avis sur le Processus catalan. J'essayais de faire entendre clairement cette opinion en Europe et d'influencer des personnes clés comme Angela Merkel ou Antonio Tajani. Puis les milieux économiques ont commencé à m'inviter à dénoncer le danger de l'indépendantisme, d'un point de vue européen. Et j'ai essayé de dire à mes amis de la gauche espagnole que le patriotisme est une valeur.

-Est-ce qu'ils l'ont compris ?

-Non.

-Continuons.

-Au mois de février 2018 je reviens pour un acte à la Estació de França. Je fais un discours en catalan, en espagnol et en français. Puis, lors d'un déjeuner au 7 Portes avec deux dirigeants de la Sociedad Civil Catalana, Josep Ramon Bosch et José Rusiñol, et le président du Círculo de Empresarios, Javier Vega de Seoane, on me propose d'être candidat à la mairie.

-Candidat de qui?

-D'une plateforme aussi large que possible. Je leur dis qu'ils sont fous : qu'il est impossible que  Ciudadanos [Parti liberal et centriste] et le PSC [Parti des Socialistes de Catalogne] fassent liste commune. Je leur dis aussi que je suis un député français et s'ils imaginent un Français face à la francophobie catalane souterraine ou parfois très visible. Et, comme si cela ne suffisait pas, il restait très peu de temps.

-Quel beau diagnostic.

-Heh...

-Quel chemin l'idée prend-elle dans votre tête ?

-Il faut être un peu mousquetaire dans la vie, n'est-ce pas ? Si on pense trop, on finit par ne rien faire. La politique française est de plus en plus un no future pour moi et les contacts et compliments espagnols ne cessent pas. Un jour, on m'a interrogé à la télévision sur ma candidature. J'ai dit que j'y refléchissais. Dix minutes plus tard Albert Rivera, que j'avais rencontré quelques mois auparavant chez Gregorio Marañón, m'appelle. "Hé, Manuel, est-ce que je peux dire que nous te soutiendrons ?". Je lui dis que oui, mais qu'il n’oublie point que c'est une candidature ouverte. Erreur ! Ou pas...

-Ce n'était pas la meilleure façon de rendre ça public.

-Peut-être... En voyant les réactions, je me rends compte tout de suite que ça va être encore plus difficile que je ne le pensais. Cependant, la nouvelle crée une grande attente. Et, plus je viens en Espagne, plus j'ai hâte de me lancer dans la course.

-Pourquoi ?

-Soyons clairs. Je voulais changer ma vie.

-Vous avez utilisé la politique pour changer votre vie ?

-Exactement. C'est un bon résumé. Quand je commence à regarder les sondages, je me rends compte que les choses sont difficiles, mais pas impossibles. Mais la seule chance que j'ai de changer ma vie est d'être candidat.

-Vous avez su très vite que les socialistes catalans ne vous soutiendraient pas.

-Immédiatement. Miquel Iceta, que je connaissais très bien, m'a dit : "Manuel, ne viens pas, je t'aime beaucoup, mais sache que nous ne te soutiendrons jamais, parce que tu viens main dans la main avec Rivera". Salvador Illa, alors secrétaire d' Organisation, m'a dit la même chose, mais plus poliment. J'ai des contacts avec des journalistes proches du socialisme, comme Joan Tapia et Rafael Jorba. Ils me disent tous que ça ne marchera pas. Ce qui est intéressant, c'est que tous ces gens ne veulent pas analyser les problèmes stratégiques. Le rejet de Ciudadanos leur suffit. La haine qu'ils lui vouent est indescriptible.

-A quoi l'attribuez-vous ?

-D'abord à la peur. Ciudadanos était le premier parti en Catalogne et menaçait de faire de très bons résultats en Espagne. Les socialistes et leur environnement intellectuel et journalistique craignaient le remplacement. Le sociocatalanisme ne correspond pas à ce qu'est Ciudadanos. Et ce que j'entends est fatidique : "Ils ne sont pas des nôtres". Ils ne disent pas qu'ils ne sont pas catalans mais presque, ils n'en sont pas loin.

-Mais voyons, c'est leur façon poisseuse de le dire.

-Certes..."Toi, Manuel, tu es français, catalan, bref, tu dois comprendre : Ils ne sont pas des nôtres". C'est très fort. En lisant l'histoire de Ciudadanos, je constate que vous-mêmes, les fondateurs, étiez déjà qualifiés d'extrême droite. C'est du jamais vu. Je suis donc obligé de devenir un avocat défenseur de Ciudadanos. Depuis le premier dîner chez Mariano Puig [1927-2021], avec qui tout a commencé et avec qui tout s'est terminé, à sa mort, en fait.

-Qui était à ce premier dîner ?

-L'avocat Emili Cuatrecasas, le directeur de La Vanguardia de l'époque, Màrius Carol... Tous deux ont eu une forte discussion. L'avocat a sorti la rengaine habituelle, comme quoi tout était de la faute à Madrid. Et Carol soutenait que non, que c'était la faute des Catalans. J'ai fini par leur dire que j'avais été approché pour chercher une solution pour Barcelone, mais qu'ils étaient en train de me démontrer que la solution n'existait pas.

-La plupart des fondateurs de Ciudadanos ont vu comme un miracle l'arrivée inhabituelle d'un Espagnol, d'un Catalan, d'un Français, d'un Européen, qui voulait faire de la politique contre le nationalisme.

-C'était mon objectif. Projeté sur une ville où l'anti-nationalisme devrait être une obligation de son ADN.

-Ces contacts avec les élites catalanes... Quelles différences avez-vous trouvé avec les élites françaises ?

-Hum... Écoutez, je suis le fils d'un homme, le peintre Xavier Valls, qui a été rejeté par sa ville. Je n'exclus donc pas que dans ma décision il y ait eu aussi une pression psychologique. Mais mon père, que Madrid a accueilli d'une manière extraordinaire...

- Mais voyons, ici, Tàpies était et est toujours aux commandes... Barcelone a fini par être l'expression ultime de l'arte povera!

-Mon père avait l'habitude de dire que Barcelone était à la fois une ville ouverte et une ville repliée sur elle-même, anti-madrilène. Pendant la campagne, j'ai porté ses mémoires sur moi, [La meva capsa de Pandora /Ma Boîte de Pandore]. Je ne cessais de voir cette même hypocrisie : les gens étaient effrayés par le Processus mais incapables de sortir du labyrinthe. Incapables de reconnaître leur propre faute. Et ils ne bougent pas, ils font du sur place... Cette dernière nouvelle de la nomination de Jaume Giró comme Conseiller de l'économie [de la Generalitat]. Le symbole spectaculaire d'une société contaminée. Giró : la Caixa [troisième entité financière et bancaire d'Espagne], le Barça et le Processus. Voici l'homme. Il a tout. Et la presse est ravie !

-La presse et ce qu'on appelle la CUP, la Candidature d'Unité Populaire. Pauvres diables. Ils ont même déclaré que Giró "les perturbait au plus haut point".

-L'imbattable décadence. Les élites catalanes : Giró, Laporta, Mediapro. Le résultat du pujolisme [de Jordi Pujol], du Processus et de la lâcheté. Mais, enfin, à propos de ce que vous me demandiez sur les différences entre les élites. Une est d'ordre technique : les élites françaises se mélangent. Un dîner à Paris est un mélange d'intellectuels, d'hommes d'affaires, de sportifs, de journalistes. On y parle de tout. Pas ici. Ici, tout fonctionne par confréries et corporations. Nous avons ici la confirmation la plus parfaite de la définition marxiste de la bourgeoisie : elle ne s'intéresse qu'à ses propres intérêts. Les élites françaises prétendent encore parler au monde. Ici, elles ne parlent qu'à elles-mêmes. Et, naturellement, si la Catalogne tombe, ils tombent avec elle. Je ne veux pas être prétentieux...

-Il est essentiel de l'être...

-Ha, ha... Avoir une conversation ici qui ne soit pas sur l'argent... C'est difficile. Les gens comme Óscar Tusquets, par exemple, avec qui on peut parler de beaucoup de choses, ne sont pas légion. L'épaisseur intellectuelle des élites catalanes ne peut pas non plus être comparée à celle des françaises. Revenons à Giró : conseiller de l'économie. Il doit être un sacré expert en distribution. Une élite n'a rien à voir avec une autre. Ni même moralement. Vous ne trouverez personne du Rassemblement National dans les dîners français. Mais ici, la relation avec le nationalisme n'est pas seulement acceptée, elle est prestigieuse. Un cas étonnant. Quand Bernard-Henri Lévy arrive à Barcelone avec ce spectacle d'Albert Boadella, et qu'il dit que le nationalisme est l'extrême droite, ils deviennent fous. Ils deviennent fous à cause d'un truisme ! Et pareil quand je refuse de serrer la main de Quim Torra [Président de la Generalitat de Catalogne à l'époque]. Cet étonnement, remarquez, je le détecte dans ma propre famille. Presque tous mes cousins Valls, par exemple, n'ont pas voulu me voir au fil des ans. S'ils rencontrent ma mère en se promenant dans le quartier de Horta, ils lui disent "bonjour", en faisant un effort et seulement parce qu'elle est tante Luisa. Le séparatisme, entendu à la française, comme la séparation entre les groupes, est plus dur et plus profond ici qu'en France.

-Et bien représenté politiquement...

-Sans aucun doute. Il y a des hommes politiques qui sont capables de représenter le moment concret d'un peuple. Par exemple...

-Pu...

-jol ! Jordi Pujol est la clé de la Catalogne. Je vais vous donner trois exemples de ce type d'homme. Un exemple positif. De Gaulle en 1958 : la Monarchie, Napoléon, la République, la Démocratie, la Grandeur. Un autre : Perón, le péronisme, la maladie de l'Argentine. Vous êtes péroniste et non argentin. Et tu ne peux pas t'en sortir. Le pujolisme est comme le péronisme : la maladie infantile de la Catalogne. Et les Catalans ne peuvent y échapper. Que proposent les élites à mon arrivée ? Le pujolisme. "Ce dont nous avons besoin, c'est... du pujolisme", me disent-elles.

-Il finira par pointer son nez sur votre propre liste !

-C'est possible. Je voulais faire quelque chose d'ouvert. Mais je n'ai pas fait de pujolisme. Et je les ai déçus. Ils n'ont pas compris que tout cela était mort et que leur héritage n'était qu'un délire raté qui leur fera honte pendant des décennies.

-Mais ni vous ni Ciudadanos n'avez pu leur faire honte à Barcelone.

-C'est comme ça, en effet. Il y a eu les circonstances... et des erreurs personnelles.

-Commençons par la partie facile.

-La motion de censure qui renverse Rajoy. Cela change radicalement le rôle de Ciudadanos. Et celui des socialistes. Le fait que le PSOE [Parti Socialiste Espagnol] accède au gouvernement oblige Ciudadanos à changer de stratégie.

-Le problème n'est pas de devoir changer, mais la stratégie qu'ils choisissent.

-C'est ce que nous disions à propos des intérêts. Rivera a choisit en fonction de ses propres intérêts. C'est un cas intéressant. À l'époque, l'intérêt de l'Espagne était que Sánchez et Rivera aient conclu un accord similaire à celui de février 2016. Mais Rivera pense que ce qui lui convient, c'est de remplacer le PP [Parti Populaire, conservateur]. Ce qui est curieux, c'est que ses intérêts et ceux de l'Espagne coïncidaient fortement, mais il n'a pas su le voir. Je comprends qu'il avait ses raisons. Cette "promesse électorale" selon laquelle qu'ils ne feraient jamais de pacte avec le Psoe...

-Bah...

-Mais Per Albin Hansson, le socialiste suédois des années 30, s'est présenté aux élections en disant qu'il allait mettre fin au capitalisme. Lorsqu'il a annoncé ses premières mesures gouvernementales, il est apparu clairement qu'il n'avait pas l'intention de le faire. On lui a fait des reproches et il a répondu que c'était une chose de devoir gagner et une autre de devoir gouverner. Et que les électeurs évalueraient son bilan aux élections suivantes. Le résultat étant que les sociaux-démocrates ont gouverné pendant 30 ans presque sans interruption. Un homme politique doit être capable de faire la distinction entre gagner et gouverner.

-Mais dans le cas de Ciudadanos, il n'est même pas nécessaire d'y faire allusion. Ciudadanos avait un mandat plus important, qui était d'empêcher le nationalisme de gouverner.

-Et regardez comment ils ont été cohérents jusqu'à la fin dans leur trahison à ce mandat. Lorsqu'il s'agit d'élire le maire de Barcelone, ils optent pour le nationalisme. Et voilà : en fin de compte, ma liste électorale a permis à Barcelone de ne pas être gouvernée par un parti qui a soutenu et soutient la sédition.

-N'avez-vous pas parlé à Rivera avant le désastre, n'avez-vous pas essayé de lui faire comprendre... ?

-Je n'ai jamais eu de conversation politique avec Rivera...

-¡... !

-C'est vrai. Et croyez-moi, ce n'est pas ma faute.

-Vous n'avez pas non plus un ego facile.

-D'accord... Mais croyez-moi : il était très difficile de parler à Rivera. C'était un homme très nerveux à cette époque...

-Nerveux... ? Je dirais plutôt que c'était un homme bien en dessous de ce qu'on lui demandait.

-Les exigences de la politique ont baissé partout... C'est un grand malheur. Le fait que les hommes politiques aient renoncé au professionnalisme est très grave. Les hommes politiques ne peuvent pas être comme les personnes qui votent pour eux. En aucun cas. C'est le terreau primordial du populisme. Dans le cas de Rivera, il y avait autre chose, je pense. Il n'aimait pas vraiment la politique. Il aimait autre chose, que je ne sais pas... ou que je ferais mieux de taire, mais pas la politique.

-Et bien, vous n'avez pas réussi à devenir maire, mais si à changer votre vie. Quelle sera votre vie maintenant ?

-Je veux faire de la politique en France. Ce n'est pas à moi de décider comment. Mais je vais participer au débat électoral en 2022. Cette année où Marine le Pen pourra être présidente de la France...

-Je ne pense pas. Ne serait-ce que grâce au magnifique système électoral français, parfaitement anti-populiste.

-Hummm. Elle en est de plus en plus proche. C'est une possibilité réelle, croyez-moi.

-Mais que se passe-t-il vraiment en France ?

-En un mot ? Un nombre croissant de Français craignent que leur nation ne disparaisse.

-Et qu'a fait la gauche, votre gauche, pour l'empêcher ?

-La gauche est en train de mourir. Elle n'a pas su répondre au nouveau monde après la chute du mur de Berlin et elle n'a pas su avoir son propre modèle face à la mondialisation économique. Mais le pire, c'est qu'elle n'a pas combattu le nouveau monde identitaire qui lui a explosé au visage le 11 septembre 2001. La gauche a abandonné l'universalisme. La gauche d'aujourd'hui, c'est cette maire de Chicago qui met son veto aux blancs lors d'une conférence de presse. En France, et c'est la raison pour laquelle je veux participer au débat, il y a encore une gauche universaliste, républicaine, laïque, celle de Jacques Julliard, celle de Caroline Fourest, qui n'a pas d'espace politique, mais qui a un espace intellectuel. Comme elle existe dans ce que j'ai lu chez Félix Ovejero ou dans le passé socialiste, celui de Felipe González et Alfonso Guerra. La gauche a laissé l'universalisme aux mains de la droite et, paradoxalement, la patrie aussi. Ce qui reste, c'est une gauche cynique et opportuniste et une gauche radicale. C'est pourquoi je ne dis plus de moi-même que je suis socialiste. C'est un mot mort. Je dis que je suis un républicain de gauche, contre le séparatisme, au sens espagnol et français.

-Y a-t-il autre chose dans la gauche espagnole que la stupidité radicale et le cynisme ?

-Non.


(Salaire gagné le samedi 22 mai à 13:07; 66 bpm, 35.3º, vacciné avec le vecteur ChAdOx1[Oxford/AstraZeneca], lot ABV8139, première dose).

 



lunes, 17 de mayo de 2021

Humanistas contra Dawkins

 



Resulta que algunos autodenominados humanistas son también fanáticos sectarios. La prueba.


 Aquí el alegato pro Dawkins en V.O.


Y aquí una tradu exprés.


"Richard Dawkins es un aliado de los oprimidos"

 

28 de abril de 2021

 

“Richard Dawkins ya no es un humanista. Al menos, no uno que merezca ser honrado como tal, según la Asociación Humanista Americana (AHA), que lo excomulgó del premio al Humanista del Año la semana pasada. La fatwa dictada por esta AHA, que incluye generosamente el "pensamiento crítico" en la lista de sus propios Diez Compromisos, acusa al biólogo evolutivo de "degradar a los grupos marginados" por pedir a sus seguidores de Twitter que "cuestionaran" el vilipendio que sufren los críticos de la teoría transgénero. Los defensores de los nuevos códigos de la blasfemia parecen haber olvidado décadas de trabajo humanista en favor de la libertad de expresión.

Personas más cualificadas que yo pueden comentar mejor el escepticismo implícito de Dawkins acerca de las teorías modernas de género, pero la cuestión central estriba en lo que se puede y no se puede cuestionar. Antes de los edictos de los Humanistas Americanos -lanzados contra un biólogo evolutivo por cuestionar las identidades que emanan de la biología humana-, este mismo ateo acérrimo había sido atacado por criticar la teología islámica.

Ahora Dawkins ha sido "cancelado" tanto por "transfóbico" como por "islamófobo" por sus discursos "hirientes" contra el Islam. Si el librepensador musulmán del siglo X, Abu al-Alaa al-Maarri, estuviera vivo hoy, probablemente sería condenado como "nuevo ateo",  término que Dawkins y otros intelectuales asociados han adoptado para poder calificar al Islam de "cuento inventado" y satirizar el Corán. También está Ibn Rushd, latinizado como Averroes, considerado por algunos estudiosos como el padre fundador del pensamiento secular en Europa Occidental, que seguramente sería tachado de "islamófobo" por sus críticas a lo que hoy se conoce como la sharía islámica.

La semana pasada, el autor argelino Said Djabelkhir fue condenado a tres años de prisión por calificar de "míticos" los relatos coránicos. Zara Kay, fundadora de Faithless Hijabi [Hiyab Atea], tuvo que escapar de Tanzania por amenazas de muerte a principios de este año por supuesta herejía contra el Islam. También están las decenas de presuntos apóstatas asesinados, ejecutados o que se pudren en las cárceles de todo el mundo musulmán.

Mientras los liberales occidentales parecen indiferentes a los millones de librepensadores musulmanes condenados por códigos de blasfemia retrógrados, Dawkins ha sido una gran influencia para los ateos del mundo islámico. En las entrevistas realizadas a librepensadores musulmanes en artículos y documentales sobre el ateísmo a lo largo de los años, un nombre que se comparte a menudo como influencia importante es precisamente el de Richard Dawkins. Tras la revocación del Premio humanista por parte de la AHA, la cofundadora de Ex-Musulmanes de Norteamérica (EMNA), Sarah Haider, tuiteó en apoyo de Dawkins llamándolo su "héroe personal".


Muchos ateos de ascendencia musulmana han encontrado en Dawkins el eco de sus creencias, cuando no las bases de su propia formación en sus críticas al creacionismo, su refutación de las fábulas coránicas, su denuncia de la histeria genocida religiosa y su condena, ampliamente malinterpretada, de las culturas que obligan a las mujeres a cubrirse. Mientras que algunos jóvenes occidentales de entre 20 y 30 años pueden estar desvinculándose adolescentemente de su faceta "nuevo ateo", pensadores como Dawkins -y los libros, artículos y vídeos de YouTube que lo acompañan- han contribuido a estimular la curiosidad intelectual de una generación de librepensadores no occidentales. Esta generación no puede organizar sus propios premios humanistas, ni siquiera expresar su propia situación, pues eso significaría salir del armario como ateos y apóstatas, enfrentándose a castigos violentos por criricar al Islam.

Además de que sus libros y conferencias han ido ganado adeptos entre los ateos, Dawkins ha apoyado a los librepensadores que desafían la inercia islamista en sus países y comunidades, arriesgando a menudo sus vidas. Ha escrito reseñas de, entre otros, The Muslim Atheist, de Ali Rizvi, y Unveiled, de Yasmine Mohamed, dos libros que narran las experiencias de los críticos de la herencia musulmana del Islam, y los retos a los que siguen enfrentándose los disidentes en el mundo musulmán. La FundaciónRichard Dawkins para la Razón y la Ciencia ayuda desde hace tiempo a los grupos ateos de herencia musulmana y ha apoyado la campaña #ExMuslimBecause, que destaca las ramificaciones del libre pensamiento en muchos países y comunidades musulmanas.

Javed Akhtar, poeta, letrista y guionista indio, ganador del premio Richard Dawkins del año pasado y que ha condenado el radicalismo islámico e hindú en su país, se define a sí mismo como un "ateo por la igualdad de oportunidades" y "musulmán ateo". Akhtar, que fundó la organización Musulmanes por la Democracia Secular, es un crítico declarado del Islam pero un adepto a su identidad musulmana, y personifica la diferencia entre el fanatismo antimusulmán y el fustigamiento sin paliativos del dogma islámico.

Aun así, mientras Dawkins podía en su día reírse de las acusaciones de ser un satanista o de las amenazas de muerte por su posición sobre el cristianismo o la evolución, ahora se ve "cancelado" por prestigiosas instituciones que antes luchaban por la libertad de expresión.

Parafraseando El gen egoísta del propio Dawkins, algunos ideólogos cooperan ahora de forma egoísta para garantizar la proliferación de sus respectivos dogmas, ayudados por el borrado de las ideas competidoras. Aquellos que imaginan el monopolio de la verdad y su permanencia en la cúspide moral necesitan que se les recuerde que, sin un intercambio abierto de opiniones que puedan considerar erróneas u ofensivas, lo que es 'correcto' y 'verdadero' nunca podrá determinarse empíricamente."


Kunwar Khuldune Shahid es corresponsal pakistaní para The Diplomat

 

viernes, 7 de mayo de 2021

Esa palabra de la que usted me habla


A vueltas con el absurdo tabú de la palabra "nigger", que la misérrima y puritana biempensancia está tratando de erradicar del bello idioma inglés. 

En el New York Times han considerado que para que el autor (racializado, of course) de un ensayo que se ocupa de la historia del vocablo "nigger" lo pueda utilizar en una tribuna pedagógica... había que hacer una nota  previa de advertencia y evitar así cualquier lectura venérea del texto. 

Aquí la profiláctica nota de los dos periodistas de la sección de Opinión.

Y aquí en tradu exprés:


"Por qué Times Opinion decidió publicar ese

insulto" 


Sobre la tribuna de hoy de John McWhorter


30 de abril de 2021


Por Ezekiel Kweku y Kathleen Kingsbury


Este artículo también aparece en el boletín Opinion Today.

El Times Opinion publica hoy una tribuna del lingüista negro (sic) John McWhorter, que es una adaptación de su última obra Nine Nasty Words: English in the Gutter. [Nueve palabrotas: desagües [o miserias] de la lengua inglesa]

La tribuna  utiliza y hace referencia a varias obscenidades, sobre todo a un insulto racista contra los negros cuyo uso e historia constituyen precisamente el tema del ensayo. En lugar de utilizar una expresión como "la palabra que empieza por N" o "el insulto contra los negros", en la tribuna se escribe literalmente la palabra en cuestión. Es una decisión inusual para el Times, y queremos compartir con ustedes el razonamiento que subyace en ella.

McWhorter recorre la historia de la palabra, en particular desde sus inicios hasta su lugar actual en nuestra cultura. Sostiene que la evolución del uso de este insulto no sólo refleja "una paulatina prohibición del racismo palmario y del vituperio hacia ciertos colectivos", sino que también demuestra un cambio cultural en las preocupaciones sobre las palabras que nuestra cultura considera verdaderamente obscenas: desde los términos sexuales y escatológicos de las clásicas palabrotas hasta los insultos a colectivos sociales. Mientras que el tabú contra el uso de la mayoría de las palabras  soeces o malsonantes ha ido desapareciendo, el tabú contra ese tipo de insultos se ha intensificado.

Hemos querido presentar a nuestros lectores este argumento de la manera más clara y respetuosa posible. 

Por norma general, en el Times no utilizamos asteriscos ni guiones para ocultar palabras obscenas. Pero incluso si estuviéramos dispuestos a romper con esta práctica, el artículo de McWhorter trata de la palabra en sí misma: su etimología, sonido y ortografía; el utilizar asteriscos o guiones para ocultar la palabra tornaría incomprensible este debate, al igual que utilizar una frase como "la palabra que empieza con N"; y emplear esta última expresión como sucedáneo también dificultaría el seguimiento de la tribuna, ya que parte del artículo se refiere precisamente a la distinción entre el uso de "la palabra que empieza con N" y el propio insulto racista. Así que llegamos a la conclusión de que escribir literalmente la palabra era la solución correcta. 

El argumento de McWhorter tiene implicaciones que van mucho más allá de la curiosidad lingüística. Como él mismo escribe: "lo que una sociedad considera irreverente revela lo que cree que es sacrosanto: el emergente  tabú sobre los insultos revela el valor que nuestra cultura otorga -aunque no siempre- al respeto hacia los colectivos de personas". 

Rastrear la evolución del uso de este insulto y la controversia que genera -incluso dentro del Times-  muestra cómo ha cambiado nuestra sociedad y los valores que ésta respeta."

Ezekiel Kweku es el editor de política en la sección de Opinión. Se incorporó al Times en 2020 procedente de la revista New York.

Kathleen Kingsbury es la editora de la sección Opinión de The New York Times, y supervisa el consejo editorial y la sección de Opinión. Anteriormente era la subdirectora de la página editorial. Se incorporó a The Times en 2017 procedente de The Boston Globe, donde ocupaba el puesto de redactora jefe de la sección digital. Recibió el Premio Pulitzer 2015 por su distinguida redacción editorial. @katiekings



Nota del bloguero: nótese que los periodistas no escriben en la nota la palabra de marras: "nigger"



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Y aquí la tribuna en cuestión, que concluye en 

favor de la autocensura y el castigo**.


Y su tradu exprés.


Cómo la palabra "que empieza por N" se convirtió en algo impronunciable


30 de abril de 2021


El profesor McWhorter es un lingüista que ha escrito mucho sobre la raza y el lenguaje. Es autor del reciente ensayo Nine Nasty Words: English in the Gutter [Nueve Palabrotas: desagües [o miserias] de la lengua inglesa], del que surge esta tribuna].

Este artículo contiene obscenidades e insultos racistas, totalmente explícitos. Ezekiel Kweku, editor de política de la sección de Opinión, y Kathleen Kingsbury, editora de Opinión, han escrito una nota sobre cómo y por qué se llegó a la decisión de publicar estas palabras en la edición del viernes del boletín Opinion Today. (Vide supra)


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LA TRIBUNA:

Por John McWhorter

"Cómo la palabra que empieza por N se hizo impronunciable"


"En 1934, Allen Walker Read, filólogo y lexicógrafo, expuso la historia de la palabra que, por aquel entonces, recogía "el mayor estigma de todos los que existen en el idioma". En todo el artículo, y en consonancia con la fuerza del tabú al que se refería, nunca llegó a escribir la palabra  concreta. La obscenidad a la que se refería: "fuck" (follar), aunque no se usa en compañía educada -o, por lo general, en este periódico-, ya no está prohibida. Hoy en día, hay otras dos palabras a las que un escritor estadounidense trataría como hizo con aquélla el señor Read. Una es "cunt" (coño) y la otra es "nigger". Esta última, sin embargo, se ha convertido en algo más que en un insulto. Se ha convertido en un tabú.

El mero hecho de escribir la palabra "nigger" aquí hace que sienta como si estuviera rebasando todos los límites, a pesar de ser yo mismo de raza negra (sic); y siento la necesidad de afirmar, en aras de la claridad y la concisión, que escribiré la palabra con libertad en lugar de "la palabra que empieza con la letra N"; no usaré la palabra gratuitamente, y eso hará que muchas veces la tenga que escribir, aunque personalmente no la ame. 

La palabra "nigger" comenzó siendo un calificativo neutro, aunque pronto se cargó con el desprecio superficial que los europeos sentían por los africanos y, más tarde, por los afrodescendientes. Su evolución, desde ser un insulto a ser una obscenidad incalificable, forma parte de una paulatina prohibición del racismo más palmario y del vituperio hacia ciertos colectivos. También forma parte de un cambio cultural más amplio: hace tiempo se enseñaba a los estadounidenses a no mencionar por su nombre las partes del cuerpo y lo que hacen: ¿realmente se baña uno mucho en un baño

Ese tipo de preocupación se ha trasladado de lo sexual y escatológico a lo sociológico, y los cambios en el uso de la palabra "nigger" nos cuentan parte de esta historia. Lo que una sociedad considera irreverente revela lo que cree que es sacrosanto: el emergente tabú sobre los insultos revela el valor que nuestra cultura otorga -aunque no siempre- al respeto hacia los colectivos de personas. (Por otro lado, debo señalar que me ocupo aquí de "nigger" como insulto y no, como ocurre con "nigga": término afectuoso adoptado por los negros como equivalente a "colega", "compa" o "tronco").

A pesar de toda su carga, por  su etimología "nigger" está, en realidad, dentro del espectro de lo anodino, como puedan estarlo los términos "damn" y "hell" (maldito e infierno-infernal). Simplemente procede de la palabra latina niger para designar a los negros, y no es de extrañar que pudiera referirse a los africanos, aunque en realidad el latín prefería otras palabras, como "aethiops" -un  vocablo usado en singular, no en plural- que, a su vez, se tomó prestado del griego*, y que significaba (¡sorpresa de nuevo!): "cara quemada". 

*[Del latín Aethiopus, y este del griego antiguo Αἰθίοψ (aithíops), probablemente derivado de αἴθω (aítho), "arder", y ὄψ (óps), "cararostro"]

El inglés se hizo con la palabra directamente a partir de la interpretación de los españoles del término latino niger, "negro", y que estos aplicaban a los africanos en el curso de sus "exploraciones". "Nigger" se parece más al niger del latín que al vocablo "negro" del español, pero eso es un accidente; pocos marineros y comerciantes ingleses pasaban sus ratos libres leyendo a Cicerón. "Nigger" es lo que diría por entonces un inglés, menos preocupado que nosotros hoy por saquear palabras extranjeras, para referirse a lo que los españoles designaban como un "negro".

Para "feng shui", del mandarín, hoy decimos en inglés: "fung shway", como hacen los chinos; pero si el término se hubiera puesto de moda en el siglo XVI, o incluso a principios del siglo XX, diríamos algo más parecido a "funk shoe-y", igual que llamamos "chop suey" a algo que, en realidad se pronuncia en cantonés: "tsopp suh-ew". Del mismo modo, "nigger" es a "niger"  lo que "fellow" es al arcaico "feller" [compadre] u "Old Yellow" al antiguo "Old Yeller" [viejo pregonero]; "nigger" resulta más natural en una boca anglófona que decir "negro" [ pronunciado/nigro/, "negro" escrito a la española manera].

El término "nigger" apareció por primera vez en escritos ingleses del siglo XVI. Resulta que la primera referencia tenía que ver con "aethiops", pues se refería a Etiopía, o al menos ese término se aplicaba de forma indiscriminada a toda África. En 1577 oímos hablar de "The Nigers of Aethiop", y esa grafía no fue más que una de las muchas que hubo a partir de ese momento. Con una ortografía aún no convencional, existían los "neger", "nigur", "niger", "nigor" y "nigre"; elija lo que más le plazca.

Ya en el siglo XVIII se presentaba a veces la palabra como una novedad. El poeta escocés Robert Burns nos enseñó, refiriéndose a niger, que el sustantivo rima con "vigor, rigor y tiger (tigre)". Detengámonos, por qué no, en esta última palabra. Si "tiger" rima con "vigor" y "rigor", eso significa que "tiger" (/taiguer/) pudo pronunciarse alguna vez como "tigger" (/tiguer/), lo cual  arroja luz sobre la rima infantil Eeeny, meeny [equivalente al hispánico “Pito pito colorito”]: 

Eeny, meeny, miny, moe/Atrapa a un tigger  [¿a un tigre u... otra cosa?] por el dedo del pie/ Y si grita: déjalo ir/Eeeny, meeny, miny, moe.

"Tigger" [pronunciado/tiguer/], sería pues el sustituto educado del "nigger" original. Después de todo, ¿realmente nos imaginamos a un tigre gritando en señal de protesta? Así, por cierto, comprendemos por qué el personaje en Winnie-the-Pooh se llama "Tigger" [pronunciado: /tiguer/ y no /taiguer/], y en los libros resulta del todo impreciso por qué es así el nombre del personaje tigresco. Pues es porque esa era una pronunciación alternativa disponible para el autor A.A. Milne. Pero lo más importante es que la versión original de la cancioncilla Eeny, meeny es como una ventana abierta a lo enormemente informal que debió de ser el uso de "nigger" en el pasado, pues incluso los niños lo cantaban alegremente en sus juegos. Durante siglos, fue el equivalente de lo que usan los blancos estadounidenses hoy con el término "afroamericano".

En 1656 alguien escribió, como quien no quiere la cosa, que el pelo lanudo era "muy corto, como el que tienen los Niger", con el término utilizado como una insulsa referencia anatómica. "Jethro, su Niger, fue entonces tomado, etc…", escribió alguien despreocupadamente en un diario 20 años después. Y este tipo de cosas continuaron durante los siglos XVIII y XIX. Al igual que "cunt" [coño] era un término anatómico habitual en los libros de texto medievales, "nigger", se escribiera como se escribiera, era simplemente la forma de decir "persona negra", con la misma despiadada displicencia que usamos los contemporáneos al hablar de los hámsters, sin que nadie se rasgue las vestiduras. Al cabo de un tiempo, la ortografía actual se impuso, lo cual hace que, por contraste, lo que ocurre en la actualidad con la palabra sea especialmente llamativo.

El  uso del vocablo a caballo de los siglos XIX y XX resulta especialmente interesante: mientras Estados Unidos se iba haciendo reconocible en su ser moderno, sus moradores decían "nigger" con tanta ligereza como hoy decimos "boomer" [hijo del baby boom] o "soccer mom" [madre que lleva a sus hijos a jugar al fútbol]. El realismo antropológico de Frank Norris es un ejemplo de ello. En su novela Vandover and the Brute, ambientada a finales del siglo XIX, el protagonista blanco de San Francisco escolta a una chica de la ciudad a la que ha estado dando clases y cuenta cosas acerca de “la graciosa negrita ['little nigger girl'], y los juegos y canciones, y cómo jugaban a los pájaros y saltaban y piaban ‘tuit, tuit’, y jugaban al juego de las mariposas que visitaban las flores”. 

Los anales de los bailes populares, poco después de esa época, recogen alegremente danzas tales como “El abrazo del conejo”, “El trote del pavo” o “El oso pardo”, pero omiten discretamente que una niña como la de Vandover fuese igualmente aficionada a un baile con contoneo conocido como “El meneo del negro [Nigger wiggle]”, llamado así como si los negros fueran una clase más de animales divertidos. (Este baile suponía, para que quede constancia, que una pareja juntara sus caderas y se agarrara el trasero mutuamente).

Por supuesto, la palabra también se utilizaba para mostrar un desprecio absoluto. No mucho después de la novela Vandover, William Jennings Bryan, el icónico y popular orador, en su cargo de secretario de Estado, comentaba sobre los haitianos: "Vaya vaya, lo que habrá que ver: negros hablando francés...". Por entonces, el oficial de los Marines encargado de Haití en nombre de nuestra gran nación de la época, L.W.T. Waller, se aseguró de que todos supieran que, independientemente de sus aptitudes lingüísticas, los haitianos eran "verdaderos negros… si se rascaba un poco".

Hubo un periodo de transición entre la ligereza de ese "verdaderos negros… si se rascaba un poco" y el momento en que la palabra se convirtió en algo impronunciable. En el siglo XX, cuando figuras negras de reconocida autoridad insistieron en que los negros americanos fueran tratados con dignidad, especialmente después de haber luchado en la Primera Guerra Mundial, "nigger" emepezó a pasar de ser neutro a ser una expresión descortés. La mayoría de los pensadores negros se inclinaron por hablar de “personas de color” o de personas "negras" [Black people]. Pero "nigger" aún no era un término obsceno.

El cine, como siempre, es de lo más esclarecedor. Se nos ha dicho que las primeras películas del cinematógrafo sonoro eran espléndidamente vulgares porque, por ejemplo, el personaje de Barbara Stanwyck se acuesta abiertamente con quien haga falta para trepar en la película de 1933 Baby Face [Carita de ángel en España]. Pero lingüísticamente, estas películas son post-victorianas. Ese tipo de personaje nunca dirá "fuck", "ass" o "shit" [follar, culo o mierda] como lo haría en la vida real el trasunto del personaje, y en las películas de esta clase, las reticencias incluyen también el término "nigger". A pesar del racismo despiadado de la época, el vocablo "nigger" está casi ausente del todo en el cine estadounidense hasta los años 60. Pero podemos encontrarlo hoy si buscamos en las zonas más oscuras: allí reinaba con un vigor atroz.

De este modo, en la película Lo que el viento se llevó nadie pronuncia la palabra, pero en el libro en el que se basa, que casi todo el mundo había leído, Scarlett O'Hara se desahoga diciendo: "Eres una negra tonta [fool nigger], y el peor día de trabajo de Pa fue el día en que se le ocurrió comprarte". Y luego piensa para sí: "He dicho 'nigger' y a mamá no le gustaría nada". Como ahora, había pues un velo que caía, y que suponía que uno debía mostrase educado –de una manera aproximada en el libro; y sin ambages en la película-. Aun así, la palabra siempre subsistía debajo de esa superficie que nuestro marine decía que debía rascarse un poco para ver al trasluz la "negritud". 

Misma época, 1937: un dibujo animado de los Looney Tunes ("El ferrocarril de Porky" [minuto 5' 30'']) nos muestra a Porky Pig como maquinista en una carrera entre trenes. El rival de Porky pasa por delante de una pila de troncos y con su velocidad la hace saltar por los aires… para que veamos debajo de la pila a un hombre negro en el suelo, perplejo. Hoy nos preguntamos por qué diantres esa persona estaba sentada en una pila de troncos. La razón es que se trataba de un gag humorístico que hacía referencia a la expresión: "Un nigger sobre una pila de leña", una antigua locución equivalente a ese "elefante en la habitación" que nadie quiere ver. Ningún personaje de los Looney Tunes pronuncia nunca la palabra "nigger", pero este chiste gráfico revela que sus creadores estaban bastante familiarizados con el uso de la palabra... ¡y con alegría!

Incluso en los años 70, el uso de la palabra en los medios era diferente al actual. The Jeffersons, una comedia de televisión que retrata a una familia negra que pasa de ser clase trabajadora en el barrio de Queens a la opulencia y a vivir en un bloque de apartamentos de Manhattan, fue considerada por entonces una representación atrevida, moderna e incluso amable de la realidad.

Esa fue la época en la que los programas de televisión dieron un salto a un realismo desconocido hasta entonces, salvo en algunos casos: el contraste entre el vodevil bobalicón de Here's Lucy y la ácida algarabía de The Jeffersons es muy notorio. Por eso, era casi un elemento definitorio de un programa como The Jeffersons el hecho de que el bocazas y estirado George Jefferson utilizara "nigger" para referirse a los negros... con (y sin) cariño.

George suelta la palabra, sin cortarse, en un justa oratoria improvisada en uno de los primeros episodios. ("¡Cógeme a ese 'nigga' [coleguita] de la élite, que está en mi puertecita / y con ese trasero como mopa, me pongo a limpiar todo el suelo hasta la escalerita!"). En el programa en que comenzó a aparecer el personaje -"All in the Family"-, aunque el intolerante Archie Bunker no utiliza la palabra, como lo haría su homólogo en la vida real, George en cambio sí la emplea, como cuando se enfurece ante la posibilidad de que Edith Bunker (una chica blanca) le ayude en su tintorería. ("¡Los 'niggers'  pensarán que ella es la dueña de la tienda, y los blancos... pensarán que hemos pintado de blanco a la dependienta!").

Tampoco es que se muestre sólo a los negros usando la expresión "nigger" para referirse a ellos mismos; los guionistas dan salida también al verdadero "nigger": los hombres blancos lo utilizan unas cuantas veces en un episodio en el que George se tropa con miembros coétaneos del Ku Klux Klan. Pero los blancos no se limitan a usarlo sólo en episodios muy especiales como éste. George llama "honky" [insulto para designar a un blanco, tipo "rostro pálido" o "cara harinada"] a su vecino blanco Tom Willis, y Tom le responde, petulante: "¿Y qué te parecería a ti si te llamase 'nigger'?". Entonces eso se entendía como algo perfectamente correcto (yo vi y el episodio y lo recuerdo); Tom sólo se refería a la posibilidad de usar la palabra, pero no empleaba directamente el término. Hoy en día, el hecho de que Tom use la palabra se consideraría, como poco, fuera de lugar.

El estatus de tabú absoluto de "nigger" no comenzó hasta finales del siglo XX; 2002 fue el último año en el que una editorial convencional permitió que un libro se titulase Nigger, como la obra de Randall Kennedy [Nigger: The Strange Career of a Troublesome Word: Nigger  [Nigger: la extraña trayectoria de una palabra problemática, es un libro de 2002 de Randall Kennedy de la Facultad de Derecho de Harvard sobre la historia y la sociología de la palabra nigger]. Mientras escribo esto, casi 20 años después, la idea de un libro con ese título suena a ciencia ficción. De hecho, sólo un año más tarde, cuando un empleado de la facultad de medicina de la Universidad de Virginia dijo: "No puedo creer que en esta época haya un equipo deportivo en la capital de nuestra nación que se llame Redskins (Pieles Rojas). Eso es tan despectivo para con los indios como lo sería para los negros un equipo que se llamase Blacks", el jefe de la N.A.A.C.P. [Asociación Nacional para el Progreso de las Personas de Color], Julian Bond, sugirió que el susodicho recibiera una formación obligatoria en materia de sensibilidad racial, añadiendo que el cuerpo le pedía simplemente que lo despidiesen. La idea en ese momento era que la palabra no debía pronunciarse, independientemente del contexto. El equivalente actual de ese empleado no utilizaría la palabra de esa manera. Más bien, el estadounidense moderno emplea "la palabra que empieza por N". Esta tradición se asentó tras el juicio de O.J. Simpson, en el que se supo que el detective Mark Fuhrman había utilizado frecuentemente "nigger" en el pasado. Christopher Darden, un fiscal negro, se negó a pronunciar la palabra "nigger", y dada la relevancia del caso y su aparentemente deliberado homenaje al señor Read (el que consideraba cierta palabra como "la palabra más sucia y asquerosa del idioma inglés"), el fiscal Darden estaba anunciando, a su manera, una nueva era.

Eso fue en 1995, y en  el otoño de ese año yo mismo realicé una entrevista radiofónica sobre la palabra, en la que los invitados y un servidor éramos libres de usarla al referirnos a ella, sin ponerle un sonoro pito por encima. Eso había sido normal hasta entonces, pero no lo sería durante mucho más tiempo, de modo que la entrevista es hoy una pieza de época.

Se puede asegurar que la transición hasta el uso de la "n-word" [la palabra que empieza por N] no fue impulsada por la tosquedad lingüística de un detective de Los Ángeles o por algo que un fiscal dijo un día durante un juicio que duró un mes. Más bien, la reticencia del fiscal Darden era ya un síntoma de algo que se respiraba en el ambiente en1995: el cambio de sensibilidad más amplio que convirtió a los insultos, en general, en la nueva blasfemia.

Esto ocurrió cuando la Generación X, nacida entre 1965 y 1980, fue alcanzando la mayoría de edad. Eran los primeros estadounidenses que se criaron en la era de los derechos civiles. Para la Generación X, la segregación legalizada era una barbarie del pasado, algo de fotos y películas en blanco y negro. Además, la Generación X creció cuando las actitudes abiertamente racistas pasaron, en general, a ser ridiculizadas y castigadas socialmente. El racismo siguió existiendo en un sinfín de manifestaciones. Sin embargo, se convirtió en algo complicado: algo que se debía ocultar, disimular y, al menos en un ambiente ilustrado, algo que había que controlar en uno mismo y denunciar en los demás, y ello en un grado quizás desconocido en cualquier sociedad hasta la fecha.

Para los norteamericanos de esta generación postcontracultural, el derecho a ciscarse en las cosas de Dios y del cuerpo les parece algo nimio e incuestionable, mientras que la necesidad de no poder hacerlo con los colectivos insultados les resulta inevitablemente urgente. El eufemismo de la "n-word"  fue una consecuencia natural, al igual que el creciente consenso de que el propio término "nigger" está prohibido, no sólo en su utilización como insulto, sino incluso cuando se hace referencia a él como signo lingüístico. Nuestra reacción espontánea es que la obscenidad consiste en las clásicas palabrotas, mientras que los insultos son algo muy distinto. Sin embargo, la realidad antropológica es que hoy en día los insultos se han convertido en nuestra forma de blasfemar: repugnan a nuestra sensibilidad, hacen que incluso las palabras que suenan parecidas sean sospechosas, y provocan no sólo la censura sino también el castigo**."

John McWhorter (@JohnHMcWhorter) es profesor asociado de linguística en Columbia University. Es autor de “The Power of Babel: A Natural History of Language” y del reciente ensayo  Nine Nasty Words: English in the Gutter — Then, Now, and Forever” del que se nutre esta tribuna.


** El castigo... sólo le ha faltado añadir al autor: ¡merecido!

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En español sólo tenemos el término "negro" para traducir las palabras del inglés "nigger, negro=/nigro/ o black person". Pero ya nos las apañaremos para importar la censura al idioma y aun aumentarla. Menudos somos... Adiós a la negrez y que se preparen las negritas y hasta las chepudas cursivas.